Régulation d’un ensemble de chaudières et de cogénérateurs

Régulation d’ensemble

Ordre de priorité

Dans l’association d’une cogénération avec une ou plusieurs chaudières, l’objectif, comme on l’a déjà précisé, est que la cogénération fonctionne un maximum d’heures sur l’année. Elle devrait donc être "en tête" de cascade ! Attention toutefois qu’une cogénération ne peut, en général, moduler qu’entre 60 et 100 %  de son taux de charge thermique.
En supposant que l’étude donne un dimensionnement de la puissance du cogénérateur de l’ordre de 40 % de la puissance totale nécessaire au bâtiment, il ne pourra moduler qu’entre une valeur de 24 à 40 % de la puissance totale. Sous les 24 % de puissance, si la cogénération est mise en tête de cascade, elle va commencer à "pomper" avec pour effet d’accentuer son vieillissement prématuré, car elle ne supporte pas les séquences répétées marche/arrêt.

Zone 1

En réalité, pour un besoin inférieur à 24 % de la puissance totale, ce sont les autres chaudières qui doivent être en "tête" de cascade. Si la chaufferie est équipée d’une chaudière à condensation, pour autant qu’elle soit dans de bonnes conditions de condensation, c’est elle qui doit assurer le besoin de chaleur. Avec sa capacité à moduler de 10 % à 100 % de son taux de charge, avec un excellent rendement à faible charge, la chaudière à condensation est tout indiquée.

Zone 2

Dans la plage de 24 à 40 % de la puissance totale nécessaire, la cogénération doit fonctionner en priorité. Une régulation mal réglée peut être à l’origine de l’arrêt prolongé ou du "pompage" de la cogénération ; ce qui n’est pas le but recherché.

Zone 3

Pendant les périodes de grands froids, la cogénération ne sera pas suffisante pour assurer les besoins de chaleur du bâtiment considéré. Il sera nécessaire de lui adjoindre une chaudière afin de lui donner le "coup de pouce sauveur". Cette opération est délicate en fonction du type de chaudière qui vient faire l’appoint. Un développement trop important de puissance de la part de la chaudière peut faire en sorte que la cogénération s’arrête voire pire qu’elle commence à "pomper" (marche/arrêt intempestifs à faible charge). Pour cette plage de fonctionnement, il sera nécessaire, si possible, de piloter les chaudières en puissance de manière à éviter de démarrer :
  • une chaudière classique avec brûleur à 2 allures en grande flamme ;
  • une chaudière plus récente avec brûleur modulant à 100 % de taux de charge.
Exemple

Situation avant :
  • un besoin thermique maximum de 600 kW ;
  • deux chaudières classiques HR de 300 kW chacune.
La configuration suivante est envisagée :
  • Une des deux chaudières est remplacée par une chaudière à condensation sans réduction de puissance par rapport à l’ancienne chaufferie. La chaudière à condensation peut moduler de 10 à 100 % de sa puissance nominale.
  • Une cogénération de 200 kW thermique équipée d’un ballon tampon est sélectionnée par l’étude de faisabilité. La cogénération peut moduler de 60 à 100 % de sa puissance thermique nominale.
Le graphique suivant donne un aperçu d’un type de régulation réalisable :
Cette régulation intelligente tente de maintenir les différents équipements de production de chaleur à leur meilleure efficacité énergétique optimale, à savoir :
  • De 0 à 24 % du besoin de chaleur : la chaudière à condensation module de 5 à 24 % du besoin total de chaleur (soit 10 à 48 % de son taux de charge). Dans cette plage, le rendement de la chaudière peut atteindre au mieux de l’ordre de 107 % sur PCI.
  • De 24 à 40 % du besoin de chaleur : la cogénération module de 60 à 100 % de son taux de charge.
  • De 40 à 90 % du besoin de chaleur : la cogénération est à 100 % de sa charge soit à son meilleur rendement (cogénération de qualité) et la chaudière à condensation module de 10 % à 100 % de son taux de charge.
  • De 90 à 100 % du besoin de chaleur : la cogénération et la chaudière à condensation restent à 100 % de leur taux de charge tandis que la chaudière existante donne le complément de chaleur pendant quelques heures par an, ce qui n’affecte que très peu le rendement saisonnier de l’ensemble des deux chaudières.
On notera ici toute l’importance du ballon tampon qui permet :
  • De réduire la puissance thermique de la cogénération.
  • D’éviter les cycles courts ou le pompage de la cogénération. De cette manière, on prolonge aussi la durée de vie de la cogénération sachant qu’elle est, non seulement liés au nombre d’heures de fonctionnement, mais aussi au nombre de démarrages.

Comment assurer la régulation d’ensemble ?

Que ce soit en rénovation de chaufferie ou lors d’un projet de conception, une régulation d’ensemble cohérente doit être assurée de manière à ce que les équipements communiquent un minimum entre eux. En réalité, la régulation ne doit pas être une "usine à gaz". Chaque unité de production de chaleur ayant sa propre régulation interne, la complexité réelle de la régulation reste interne aux unités.
Systèmes et composants 
Pour plus de renseignements sur la régulation des chaudières, cliquer ici !
Cogénération
Pour plus de renseignements sur les cogénérations, cliquer ici !
Ce qui nous intéresse ici, sur base d’un ensemble d’équipements de production de chaleur, c’est de  "sélectionner le bon équipement au bon moment" en partant toujours de l’idée de choisir l’équipement qui donnera la meilleure performance énergétique à l’ensemble.
Sur base des zones de prise en charge des besoins thermiques définies ci-dessus et appliqué à une installation type choisie arbitrairement, voici un type de régulation d’ensemble qui pourrait être proposé.
Régulation ensemble chaudière(s)/cogénération.
Comme le montre le schéma ci-dessus, certains fabricants proposent une solution complète où des chaudières cohabitent avec un cogénérateur. Pour que la régulation de l’ensemble soit cohérente, il est nécessaire qu’un des régulateurs des chaudières puisse superviser le cogénérateur. Le superviseur peut par exemple être le régulateur d’une nouvelle chaudière à condensation.

Fonctionnement

La sonde de température externe Tex est en communication avec le régulateur de la chaudière à condensation qui sert de superviseur pour l’ensemble des équipements. Les courbes de chauffe intégrées au régulateur de la chaudière à condensation permettent de piloter en "température glissante" :
  • Les chaudières en fonction du différentiel entre la consigne de température donnée par la courbe de chauffe du circuit secondaire le plus froid et la valeur mesurée au niveau de la sonde Td.
  • Les vannes 3 voies Vm1 et Vm2 en fonction du différentiel entre la consigne de température donnée les courbes de chauffe propres à chaque circuit et la température de départ des mêmes circuits.
La sonde de température externe Tex pourrait aussi être permettre de sélectionner l’équipement à mettre en tête de cascade :
  • Dans la zone 1 (été), le cogénérateur risque de "pomper" (marches/arrêts nombreux) car il se trouve en dessous de sa plage de modulation. Ce pompage accélère son usure et augmente le risque de panne. Le régulateur d’ensemble préfèrera sélectionner la chaudière à condensation modulant de 10 à 100 %.
  • À partir de la zone 2 (mi-saison, hiver), c’est la cogénération qui est en tête de cascade avec un appoint successif de la chaudière à condensation (zones 2 et 3) et de la chaudière classique (zones 2, 3 et 4).
La sonde de température de départ Td, en fonction de la cascade sélectionnée, permet :
  • Pour la zone 1, de libérer uniquement la chaudière à condensation en donnant la priorité au fonctionnement à charge partielle. L’ordre est donc donné aux vannes Cv_ch_con1 et Cv_ch_con2 d’irriguer la chaudière.  La sonde Td commande la modulation du brûleur de manière à respecter la consigne de température donnée par la courbe de chauffe.
  • Pour la zone 2, de libérer la cogénération et fermer la vanne Cv_cog.
  • Pour la zone 3, de libérer la chaudière à condensation en donnant la priorité au fonctionnement à charge partielle. En effet, dans cette zone le cogénérateur n’arrive plus à relever la température de la sonde Td pour atteindre la consigne de température donnée par la courbe de chauffe.
  • Pour la zone 4, de libérer la chaudière classique. Dans cette zone le cogénérateur et la chaudière à condensation n’arrivent plus à relever la température de la sonde Td pour atteindre la consigne de température donnée par la courbe de chauffe. La sonde Td commande la modulation du brûleur. La vanne 3 voies modulante permet éventuellement de réchauffer le retour de la chaudière s’il est trop froid.



Régulation individuelle de la cogénération

Le nombre d’heures de fonctionnement et le nombre de démarrages de la cogénération associée à un ballon tampon peut être influencé par la régulation :
  • du taux de charge du cogénérateur par rapport à sa puissance thermique nominale et au besoin de chaleur total ;
  • du taux de charge du ballon tampon.

Taux de charge du cogénérateur

La régulation interne du cogénérateur peut être réalisée selon le rapport entre le besoin instantané de chaleur (en kWth) et la puissance thermique nominale de la cogénération en dessous duquel la cogénération reste à l’arrêt. Pratiquement, cette régulation s’exprime par sa capacité à gérer la modulation de puissance de la cogénération. Une cogénération classique peut en général avoir une modulation de puissance entre 60 et 100 %.
Exemple
Soit :
  • une cogénération de 300 kW thermique ;
  • un rapport : besoin de chaleur/puissance nominale de la cogénération de 60 %.
A l’instant t, la cogénération est à l’arrêt. La cogénération redémarrera lorsque le besoin thermique sera de 300 x 0.6 = 180 kW.
Sur base de différentes simulations effectuées avec CogenSim, on peut montrer l’influence de ce type de régulation.
Les hypothèses sont les suivantes :
  • Les profils de chaleur et d’électricité sont ceux donnés par défaut dans CogenSim.
  • Plage de modulation de la cogénération : 100 à 60 %.
  • Le taux de charge maximum du ballon en dessous duquel la cogénération module dans sa plage de modulation : 60 %.
  • Le taux de charge minimum du ballon à partir duquel la cogénération redémarre : 40 %.
Dans les simulations on fait varier le rapport besoin thermique/puissance cogénérateur, soit 60 et 90.

Temps de fonctionnement (heures/an)

Nombre de démarrages annuel
Taux de charge du cogénérateur (%)
0-39
40-49
50-59
60-69
70-79
80-89
90-99
100
Besoin/puissance cogénération









60%



1261
169
479
387
5714
21
90%



653
77
470
387
5709
1
 
On constate que :
  • Cette régulation permet de "grappiller" quelques heures de fonctionnement lorsqu’on dispose d’une cogénération qui peut démarrer à un taux de charge de 60 %.
  • Attention, cependant, que le nombre de démarrage augmente légèrement lorsqu’on passe de 90 à 60 %, ce qui sollicite le cogénérateur en accélérant son vieillissement.

Taux de charge du ballon

En dessous d’une certaine valeur de taux de charge maximum, la cogénération module en puissance. Plus ce taux de charge maximum est élevé, plus la cogénération commence à "pomper" (marche/ arrêt important). Ce qui nuit naturellement à longévité du cogénérateur.
Exemple
Les simulations sont de nouveau effectuées avec CogenSim.
Les hypothèses sont les suivantes :
  • La puissance thermique du cogénérateur : 300 kW thermiques.
  • La plage de modulation de la cogénération : 100 à 60 %.
  • Le rapport besoin de chaleur/puissance cogénérateur en dessous duquel la cogénération module en puissance : 60 %.
  • Le taux de charge minimum du ballon à partir duquel la cogénération redémarre : 40 %.
Dans les simulations on fait varier le taux de charge maximum du ballon en dessous duquel la cogénération module dans sa plage de modulation, soit 60 et 90 %.

Temps de fonctionnement (heures/an)

Nombre de démarrages par an
Taux de charge du cogénérateur (%)
0-39
40-49
50-59
60-69
70-79
80-89
90-99
100
Taux de charge max du ballon à partir duquel la cogénération module (100 à 60 %)









60%



1261
169
479
387
5714
21
90%



789
117
464
338
6158
593
On constate que choisir un taux de charge maximum du ballon pas trop élevé (autour des 60 %) permet :
  • D’augmenter le nombre d’heures de fonctionnement du cogénérateur. En fait, la cogénération module beaucoup rapidement sa puissance par rapport aux besoins de chaleur au travers du ballon en "épousant" mieux le profil du besoin.
  • De réduire le nombre de démarrages de manière draconienne, ce qui allonge la durée de vie du cogénérateur.

Régulation individuelle des chaudières par rapport à la cogénération

Lorsqu’une ou plusieurs chaudières existantes sont en appoint de la cogénération, les régulations individuelles de chaque chaudière doivent être adaptées par rapport au cogénérateur. Souvent, on observera que lorsque le besoin de chaleur devient supérieur à la puissance thermique des cogénérateurs, on démarre une chaudière d’appoint sans modulation de puissance au niveau du brûleur. Le "boost" de puissance de la chaudière va tout de suite "affoler" la régulation du cogénérateur qui risque de s’arrêter rapidement. Il en résulte un risque non négligeable de "pompage" de la cogénération  altérant ainsi :
  • la rentabilité de la cogénération ;
  • la durée de vie de la cogénération tout en augmentant le risque de panne.
Immanquablement, la chaudière d’appoint devra démarrer, pour les anciens modèles en petite flamme et pour les modèles récents au minimum de la plage de modulation (à 10 % pour une chaudière à condensation par exemple).
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